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Le dépistage chez les camionneurs

Les contributions qui suivent ont été collectées sur le terrain par les 04 Experts du projet MOVIHCAM dans les villes suivantes : Bafoussam, Batouri, Douala, Kribi. Sur le thème ‘Dépistage chez les camionneurs, il a été demandé aux experts d’interviewer des camionneurs, du personnel médical travaillant (telles que les CPS/APS) afin de relever les freins, croyances les plus répandus chez les camionneurs ainsi que les stratégies par eux adoptées. Les informations collectées permettent de mettre en évidence les principales tendances qui se dégagent (et qui très souvent se rejoignent) au sein d’une même population cible dans différents lieux géographiques. Ce document pourra ainsi contribuer à apporter des éléments de compréhension et fournir des arguments aux personnes, en particulier les pairs éducateurs et les acteurs de lutte contre le VIH, qui travaillent sur le terrain afin de convaincre avec plus d’efficacité les camionneurs à se faire dépister et connaître leur statut et, s’ils sont dépistés positifs afin de les amener à prendre leur traitement. En général afin de les convaincre à adopter des gestes responsables afin de préserver leur santé.

Globalement, une grande tendance se dégage : les camionneurs sont ouverts au dépistage, car il leur permet notamment d’être fixés sur leur statut après une prise de risques. Même si des freins à retirer leurs résultats ou encore des croyances liées, entre autres, à la religion et aux traitements alternatifs persistent chez cette cible.

DETAILS DES REPONSES DONNEES

De nombreuses raisons poussent les camionneurs à effectuer ou à vouloir effectuer leur test de dépistage et retirer leurs résultats. Parmi ces raisons, ils évoquent : faire son test permet de connaître son état de santé, son statut sérologique quand on a pris des risques (Douala, Batouri, Bafoussam, Kribi); ils le font aussi par obligation professionnelle (Douala) ; à cause de la gratuité du test lors des campagnes de dépistage ou dans les hôpitaux (Douala, Bafoussam).

Quand on interroge les croyances les plus répandues chez les camionneurs  en matière de dépistage, les réponses sont les suivantes : le sida est une invention des occidentaux » (Douala, Kribi) ; les commandements de Dieu permettent de rester en santé (Douala) ; les erreurs médicales (Batouri); les seringues infectées (Batouri) ; le dépistage c’est juste pour savoir si on a pris des risques (Kribi) ; le dépistage par personne interposée suffit (Kribi).

Quant aux freins les plus souvent recensés par rapport au dépistage, on note : le manque de temps (Douala, Batouri) ; la peur de retirer ses résultats (Batouri) ; la rareté des FOSA dans les points d’arrêt le long des trajets (Kribi).

Par ailleurs, il faut relever qu’il existe chez eux des freins également associés aux différentes alternatives à la médecine moderne. Ces alternatives sont soit liées à la religion au pouvoir de guérison de la prière (Kribi) ou encore au pouvoir de guérison des tradipraticiens (Bafoussam). Des alternatives ayant pour  conséquence la détérioration de l’état de santé du patient (Kribi) ; les perdus de vue (Batouri, Kribi).

Les lieux où ils vont souvent se faire dépister sont entre autres : les hôpitaux d’état, centres de santé et cliniques (Douala,  Kribi, Bafoussam) ; les UPEC et CTA (Batouri, Kribi) ; les centres de planning familial (Kribi) ; les laboratoires d’analyses médicales (Kribi) ; les campagnes de dépistage gratuit (Bafoussam).

Quand on demande aux CPS/PAS si elles reçoivent souvent les camionneurs dans leurs centres de prise en charge, les réponses se rejoignent. A l’unanimité, ils/elles répondent par l’affirmative (Douala, Batouri, Kribi, Bafoussam). A la question de savoir comment ils perçoivent le dépistage, ils répondent notamment que les camionneurs viennent pour être fixés sur leur statut sérologique (Douala) ; ils sont conscients qu’il est important de le faire après une prise de risques (Kribi) et qu’il s’agit d’un acte volontaire (Douala, Batouri) ; ils savent que c’est une nécessité même s’ils sont quelques fois réticents (Kribi) ou encore ils pensent que c’est à la femme de faire le dépistage dans le couple (Bafoussam).

Pour faire face à ces nombreux freins ou alors pour ces perceptions quelques fois erronées, leurs stratégies sont nombreuses pour les amener à faire le test et à retirer leurs résultats. Parmi ces stratégies, le personnel médical assure un bon pré et post counseling (Batouri, Kribi) ; rassure de la confidentialité des résultats (Batouri) ; se rapproche du laboratoire pour la fiabilité des résultats et davantage de la rapidité  du rendu des résultats afin de limiter le temps d’attente du camionneur (Bafoussam).

Cependant avec les cas séropositifs, le suivi, l’accompagnement, l’observance restent difficiles comme l’avoue l’ensemble des personnes interrogées. Parmi les difficultés les plus souvent rencontrées, il cite : le refus d’accepter son statut (Douala) ; la non observance (Douala) ; l’échec du suivi en stratégie avancée car refus de communiquer son lieu de résidence ou encore son vrai numéro de téléphone (Batouri) ; leur mobilité (Bafoussam) ; les fausses croyances liées aux traitements traditionnels divers, à la prière ou la sorcellerie (Kribi) ou encore le manque de moyens des patients pour faire les examens de départ (Kribi).